NIETZSCHE Friedrich 1844-1900 (Philosophe)
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Friedrich Wilhelm Nietzsche est un philologue, philosophe et poète allemand né le 15 octobre 1844 à Röcken, en Prusse, et mort le 25 août 1900 à Weimar, en Allemagne (à 55 ans)
Portrait d'avant 1900, auteur inconnu, figurant sur la couverture de "Ce que Nietzsche a vraiment dit".
What Nietzsche Really Said, 2000 (ISBN 978-0-8052-1094-1)
de Robert C. Solomon et * Voir plus bas
L'œuvre de Nietzsche est essentiellement une critique de la culture occidentale moderne et de l'ensemble de ses valeurs morales (issues de la dévaluation chrétienne du monde), politiques (la démocratie, l'égalitarisme), philosophiques - le platonisme et toutes les formes de dualisme métaphysique - et religieuses - le christianisme.
Cette critique procède d'un projet de dévaluer ces valeurs et d'en instituer de nouvelles dépassant le ressentiment et la volonté de néant qui ont dominé l'histoire de l'Europe sous l'influence du christianisme ; ceci notamment par l'affirmation d'un Éternel Retour de la vie et par le dépassement de l'humanité et l'avènement du surhomme.
L'exposé de ses idées prend dans l'ensemble une forme aphoristique ou poétique.
Peu reconnu de son vivant, son influence a été et demeure importante sur la philosophie contemporaine de tendance continentale, notamment l'existentialisme et la philosophie postmoderne.
Mais Nietzsche a également suscité ces dernières années l'intérêt de philosophes analytiques, ou de langue anglaise, qui en soutiennent une lecture naturaliste remettant en cause une appropriation par la philosophie continentale jugée problématique [1].
Professeur de philologie à l'université de Bâle dès l'âge de 24 ans, il obtient un congé en 1879 pour raison de santé. Les dix années suivantes, il publie à un rythme rapide ses œuvres majeures.
En 1889, il sombre dans la démence et passe les dix dernières années de sa vie dans un état mental quasi végétatif [2].
Après sa mort, l'interprétation de son œuvre est défigurée par l'image de la folie et par la propagande nazie.
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[1] cf. Brian Leiter (en), "Nietzsche's naturalism reconsidered", in Oxford Handbook of Nietzsche, 2009 :
« According to one recent scholar, “Most commentators on Nietzsche would agree that he is in a broad sense a naturalist in his mature philosophy”. This may come as a surprise to those who think of Martin Heidegger, Walter Kaufmann, Paul DeMan, Sarah Kofman, and Alexander Nehamas, among others, as “commentators” on Nietzsche. And yet there are, indeed, clear signs that in the last twenty years, as Nietzsche studies has become more philosophically sophisticated, the naturalist reading of Nietzsche has come to the fore, certainly in Anglophone scholarship. »
Voir aussi, en français : Florian Cova, "Nietzsche post-moderniste ?", in {L'autre côté}, n°1, Été 2009 : La French Theory et ses avatars.
[2] Jacques Rogé, Le Syndrome de Nietzsche, 1999 : « Après le décès de Franziska en 1897, Nietzsche fut recueilli chez sa sœur à Weimar où il vécut une existence purement végétative jusqu'à sa mort le 25 août 1900. »
Friedrich Nietzsche en bref
Principaux intérêts | Métaphysique, christianisme, culture, nihilisme, morale, esthétique |
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Idées remarquables | Volonté de puissance, surhomme, Éternel Retour |
Œuvres principales | |
Influencé par | Darwin, Démocrite, Emerson, Feuerbach, Goethe, Héraclite, Kant, Montaigne, Pascal, Platon, Rousseau, Schopenhauer, Spinoza, Voltaire, Wagner |
A influencé | Bachelard, Sigmund Freud, Bataille, Blanchot, Camus, Cioran, Derrida, Deleuze, Foucault, Khalil Gibran, Heidegger, Marcuse, Scheler, Sloterdijk |
Citations | http://www.babelio.com/auteur/Friedrich-Nietzsche/2132/citations |
Voir aussi Le silence du corps (citation sur la solitude)
Sources : Wikipédia
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[3] Ainsi parlait Zarathoustra [ou Ainsi parla Zarathoustra selon la traduction de Maël Renouard]. Un livre pour tous et pour personne (en allemand : Also sprach Zarathustra. Ein Buch für Alle und Keinen) est un poème philosophique de Friedrich Nietzsche, publié entre 1883 et 1885.
Voir
R. C. Solomon, K. M. Higgins : Ce que Nietzsche a vraiment dit
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Agressivité, indépendance, flamboyance, sarcasme, et l'évocation de Friedrich Nietzsche frappe en force les cordes sensibles de la culture contemporaine. Beaucoup de gens ont lu et discuté ses écrits. Mais les idées de Nietzsche sont souvent éclipsés par les mythes et les rumeurs qui entourent sa vie sexuelle, sa politique et sa santé mentale. Dans cette analyse vivante et complète, les chercheurs Robert C. Salomon et Kathleen M. Higgins se sont rendus au cœur de la philosophie de Nietzsche, de ses idées sur la "Volonté de Puissance" dans son attaque contre religion et morale, et son infâme Übermensch (Surhomme).
« Salomon et Higgins ont mis sur pied une trousse de survie pour ceux qui envisagent une expédition en territoire Nietzsche, un cours de recyclage pour ceux qui ont été là, une carte des zones de danger, et une encyclopédie des principales merveilles. Un livre précieux. »
Arthur C. Danto, professeur émérite de philosophie Johnsonian, l'Université de Columbia
« Voici le fil d'Ariane qui vous mènera à travers le dédale de la philosophie de Nietzsche. »
Sam Keen, auteur de Apprendre à voler
« Comme tous les penseurs aphoristiques, Nietzsche semble souvent se contredire. Être non seulement un philosophe, mais aussi un artiste, n'est pas facile à comprendre - d'où de nombreux malentendus et préjugés. Ce livre "reconstruit" le "vrai" Nietzsche, que, souvent - comme le sceptique - Nietzsche a lui-même déconstruit. »
John-François Revel, coauteur de Le moine et le philosophe
Friedrich Nietzsche, ses derniers sanglots
Il fut au cœur de l'une des scènes les plus bouleversantes de l'histoire des penseurs occidentaux.
Nous sommes en 1889, et le philosophe réside alors dans une maison située sur la rue Carlo Alberto, à Turin, en Italie. Une matinée ordinaire se transforme en un moment qui changera le cours de son existence. Tandis qu’il se dirige vers le centre-ville, une scène déchirante se dresse devant ses yeux.
Un cocher, furieux de l’immobilité de son cheval, s’acharne à le frapper avec un fouet. L’animal, exténué, ne trouve plus en lui la force d’avancer. Ses membres fléchissent sous le poids de l’épuisement, mais le maître impitoyable persiste à le tourmenter, insensible à son agonie.
Terrifié et indigné, Nietzsche ne peut rester spectateur de cette brutalité. Il s’approche précipitamment, interpelle violemment le cocher, puis se tourne vers le cheval à bout de forces.
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Là, au milieu de la rue, il entoure l’animal de ses bras et éclate en sanglots. Des témoins racontent qu’il murmure doucement quelques mots à l’oreille de l’animal, des mots que nul ne peut entendre. Certains affirment qu’il aurait dit : « Mère, je suis fou. »
C’est à ce moment précis que l’esprit de Nietzsche vacille et s’effondre. Il s’évanouit et sombre dans un état dont il ne sortira jamais. Pendant dix longues années, jusqu’à sa mort, il demeure plongé dans un silence abyssal, incapable de retrouver la raison.
Les autorités, alertées par ce qu’elles perçoivent comme un comportement erratique, l’arrêtent pour trouble à l’ordre public avant de le transférer dans un asile. La société, dans son incompréhension, conclut que ce geste – embrasser un cheval martyrisé et pleurer avec lui – est la preuve irréfutable de sa folie.
Mais ce moment tragique recèle une profondeur que certains refusent de réduire à une simple manifestation de maladie mentale. Milan Kundera, dans L’insoutenable légèreté de l’être, évoque cet instant où Nietzsche enlace le cheval blessé. Pour Kundera, ce geste et les mots murmurés au creux de l’oreille de l’animal incarnent une demande de pardon. Nietzsche, dans un élan de compassion infinie, aurait demandé pardon au nom de toute l’humanité, coupable de traiter les êtres vivants avec une cruauté sans bornes, de les exploiter, de les soumettre à notre volonté comme de simples outils.
Nietzsche n’a jamais été connu pour être un défenseur des animaux ni pour sa sensibilité à la nature. Pourtant, ce spectacle de maltraitance a laissé une empreinte indélébile en lui. Ce cheval, dernier être avec lequel il a établi un lien véritable, est devenu pour lui un symbole. Ce n’était pas seulement l’animal qu’il étreignait, mais la douleur elle-même. Une douleur universelle, unie à l’essence même de la vie, à laquelle Nietzsche s’est identifié dans un ultime éclat d’humanité.
Transmis par Christine Leborgne le 05/01/2025 "Ferré, Baudelaire, Verlaine et autres poètes..."