Vache et cheval iakoutes
Archive du 28 avril 2023
D'après des articles de Fenêtre sur la Russie (ex Russia Beyond)
Un peu de situation géographique
La Iakoutie, au nord de la Russie, est la région habitée la plus froide au monde, avec des températures hivernales descendant jusqu’à -50°C en moyenne, mais souvent encore plus bas. Les humains doivent être lourdement équipés pour y survivre.
Le climat de Iakoutie est nettement continental. En été, les températures peuvent atteindre +35°C, tandis qu'en hiver, elles peuvent chuter jusqu'à -50°C. Mais il existe ce que l’on appelle le "pôle du froid", point habité en permanence le plus froid de la planète. Les localités de Verkhoïansk et Oïmiakon * se disputent ce titre. Le mercure y est déjà descendu jusqu’à près de -70°C, mais il fait également froid dans d’autres parties de la région.
* Aujourd'hui, deux endroits se disputent le titre du point de peuplement le plus froid de la planète : le village d'Oïmiakon (500 habitants) et la ville de Verkhoïansk (un peu plus de 1 100 résidents). Leurs températures records ne sont qu’à environ 0,1° d’écart.
Voir Terres Australes et Antarctiques Françaises
Lien externe Costumes traditionnels de Iakoutie (Vidéo)
La vache iakoute, la plus résistante au froid de toutes
La première chose qui attire l’attention est que les vaches iakoutes arborent un modeste gabarit, puisqu’elles apparaissent environ 1,5 fois plus petites que n’importe quelle race européenne. La taille d’une vache adulte n’est que de 110cm. Elle ne pèse que 400kg en moyenne (les taureaux particulièrement grands peuvent toutefois atteindre 600kg), alors que les autres races de vaches pèsent généralement environ 600kg et les taureaux près d’une tonne.
La vache iakoute a des pattes courtes et fortes, ainsi qu’une laine incroyablement épaisse de différentes couleurs. Cette dernière est essentielle à la survie dans le froid extrême de l’hiver et à la protection contre les infâmes moustiques iakoutes en été.
En hiver, les vaches ne paissent plus dans les prés, bien sûr, mais elles se rendent toujours au point d’eau pour s’abreuver. Or, certains agriculteurs leur cousent des "soutiens-gorge" * pour garder leurs mamelles au chaud par tous les temps.
* Voir une vidéo (22 décembre 2020)
Dans le district d’Eveno-Bytantaïski, dans le nord de la Iakoutie, a été enregistré un cas où trois jeunes vaches sont allées se promener à la mi-septembre et ne sont rentrées qu’en décembre par -40°C. Dans la nature, elles s’étaient nourries de vieille herbe et de neige.
Dans le district de Viliouïsk, au centre de la république, une vache est également partie en septembre pour revenir fin janvier et, après tout cela, a donné naissance à un veau à l’extérieur par -45°C.
Observez ces vaches iakoutes allant s’abreuver par -45°C !
[https://www.youtube.com/shorts/9UcNwY5wNDg]
« Gène du froid »
Il s’avère qu’une telle « résistance » provient de la nature. Des scientifiques de l’Institut de cytologie et de génétique de la branche sibérienne de l’Académie des sciences de Russie ont identifié une mutation génétique unique chez la vache iakoute, que l’on retrouve également chez les phoques et les morses. Lorsqu’il fait froid, leur rythme cardiaque ralentit et leur corps économise de l’énergie.
En outre, cette espèce possède un tube digestif plus long que les autres, ce qui signifie qu’elle peut digérer des aliments moins nutritifs.
Il reste à étudier comment exactement ces vaches sont apparues en Iakoutie, mais l’on sait que cette espèce s’est séparée des européennes il y a environ 5 000 ans (les ancêtres des vaches – les aurochs – ont été domestiqués il y a 8 000 ans au Moyen-Orient). Elles ont ensuite pu évoluer et s’adapter aux conditions iakoutes.
Autrefois menacée d’extinction
Malgré son endurance, la race iakoute est plutôt rare. En raison de leur faible production de lait et de viande, leur élevage n’est pas très rentable. À l’époque soviétique, lorsque des fermes collectives et d’État ont été créées en masse dans tout le pays, la race iakoute a été croisée avec d’autres pour augmenter la quantité de lait. Cependant, cela n’a conduit qu’à une réduction de la population de vaches indigènes.
Toutefois, en réalité, si la vache iakoute donne peu de lait, la teneur en matière grasse de ce dernier s’avère environ deux fois plus élevée que celle des races européennes – jusqu’à 11 % – et elle contient plus de protéines et de minéraux.
Aujourd’hui, au contraire, les scientifiques et les agriculteurs font revivre la population de vaches iakoutes. L’on en compte environ 2 500, dont 900 vaches laitières.
Le cheval iakoute, race la plus résistante au monde face au froid
Massifs, trapus et à la crinière malicieuse, les chevaux iakoutes ne craignent pas les gelées les plus sévères. Cette race unique ne vit que dans cette région glaciale et se sent parfaitement bien même par des gelées de -50°C.
Officiellement, cette race n'a été reconnue qu'à la fin des années 1980, mais les scientifiques pensent qu'elle existe depuis des milliers d'années. Ils sont considérés comme les descendants directs des anciens chevaux primitifs qui sont venus d'Asie et ont vu leur apparence changer pour s'adapter à cet environnement plus rude.
Aujourd'hui, en Iakoutie, il existe trois sous-espèces de cette race : l'original nordique (appelé cheval de Verkhoïansk, du nom du deuxième lieu de peuplement le plus froid au monde), le cheval méridional, qui est plus petit, ainsi que le grand type méridional, qui a été croisé avec d'autres races.
Un cheval iakoute moyen ne mesure que 140-145 cm au garrot, mais pèse environ une demi-tonne. Ils sont principalement bruns et gris, les autres couleurs de robe étant plus rares. Ils font généralement preuve d’un tempérament amical, calme et curieux, et s’avèrent particulièrement doués pour courir sur des terrains accidentés.
En Iakoutie (notamment à Verkhoïansk et Oïmiakon) des températures d'environ -70°C ont pu être enregistrées. Cependant, pour les chevaux iakoutes, ce n'est pas du tout un problème – grâce à leur épais sous-poil, ils peuvent rester à l'air libre même durant les hivers les plus extrêmes. Par grands froids, ils sont recouverts d'un « manteau » de gel et n’en souffrent pas, et même les poulains passent leurs nuits à l'extérieur. Physiquement, ils peuvent rapidement accumuler de la graisse sous-cutanée. De vraies boules de poils dotées de sabots !
Les chevaux iakoutes sont également élevés dans des haras, mais ils sont assez indépendants. Par exemple, ils sont capables de se nourrir tout seuls en ratissant l'herbe sous une couche de neige d'un mètre d’épaisseur avec leurs sabots.
Dans le Nord, il est difficile d'imaginer la vie sans eux : loin des villes, sans routes, il s’agit du principal moyen de transport pour les habitants. Lorsqu'un 4x4 s'enlise dans la neige, un cavalier y passe allègrement à cheval.
Les éleveurs de rennes iakoutes ont également recours à ces chevaux. Malgré sa masse corporelle, cette race court assez vite, même dans la neige épaisse et en dehors des routes. Néanmoins, on peut aussi apercevoir des chevaux iakoutes en attelage.
En une journée, un tel cheval peut parcourir jusqu'à 100 km et transporter 300 kg de marchandises. Traditionnellement, avant les longues expéditions dans la toundra, le cheval ne mange pas durant une journée entière afin de perdre un peu de graisse et de courir plus vite.
Les chevaux iakoutes sont considérés comme des doyens parmi les chevaux : ils travaillent activement jusqu'à 25-27 ans, alors que la plupart des autres races ne peuvent le faire que jusqu'à 20 ans en moyenne.
Les habitants de la région fabriquent en outre une boisson fermentée traditionnelle appelée koumys à partir du lait de jument. Pour vous faire une idée... Voir Plats russes |
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Cette race de cheval iakoute est considérée comme indigène, elle ne peut vivre que dans les régions du Nord. Le climat chaud ou méridional ne leur convient aucunement. On ne peut ainsi rencontrer un tel cheval qu'en Iakoutie et en Extrême-Orient russe.
Voilà, bonne lecture, bon voyage, mais bien emmitouflé... ;-)